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10 décembre 2009

Quelques réflexions sur environnement et travail

Quelques idées échangées lors de notre soirée-débat mardi sur les effets des accords environnementaux sur le monde du travail.

Et d'abord ce constat qu'il faut absolument refuser : il pourrait être très tentant et il est incontestablement très possible que la lutte contre le réchauffement climatique se fasse sans rien changer au système économique et social en place et soit le prochain moteur de l'aggravation de la concentration financière et capitalistique, de l'augmentation des inégalités, de la marginalisation des régions et des territoires en difficulté, de l'exclusion accrue de salariés peu qualifiés et peu mobiles. Une réponse purement technologique aux défis climatiques et environnementaux irait vraisemblablement en ce sens, sans offrir pour autant de garanties à long terme pour la planète. Je visitais récemment les laboratoires de l'Institut Français du Pétrole : il est fascinant de voir comment une filière "mise en accusation" se rétablit pour inventer ... les solutions ? le travail ? ... le profit  ! de demain.

Malgré les promesses de nouveaux emplois dans les filières concernées, il n'est pas sûr que cela suffise à sauver les emplois en Europe et dans le Cher. Pour une raison simple : dans le même temps, tout est fait pour retirer l'emploi là où il existe encore. La filière bois pourrait créer des emplois autour de l'utilisation de la biomasse forestière ? Oui, mais on sait qu'au mieux, ils compenseront les pertes d'emploi attendues dans une filière qui mécanise de plus en plus l'exploitation forestière. Le bâtiment pourrait repartir ? Oui mais on s'acharne aujourd'hui à supprimer la main d'oeuvre des chantiers, sur des métiers pénibles certes mais qui font encore vivre des centaines de milliers de familles. L'économie solidaire, qui a permis l'insertion par l'activité économique de personnes en grandes difficultés, s'est développée sur des niches "écologiques" qui pourraient s'étendre et recréer du travail manuel ? Oui mais quand ces niches deviennent des marchés, elles sont récupérées par des grands groupes qui les mécanisent (filière du recyclage hier, de l'agriculture biologique demain, ...)

Il faut donc, dans le même temps que des règles internationales sont négociées pour le climat, négocier aussi des règles internationales pour le travail. Car sinon, le coût du travail en Europe restera encore longtemps le prétexte à poursuivre dans la voie de l'industrialisation de tous les process et de la délocalisation des process non mécanisables. Le coût carbone (et financier) du transport ne semble pas assez dissuasif pour empêcher cela.

Si l'on veut changer plus profondément le système qui a produit la crise économique comme la crise énergétique et environnementale, il faut aussi agir simultanément sur les modes de production, les modes de consommation (partage des produits et des usages), avec pour conséquences de modifications des formes et de la localisation du travail. Il faut pouvoir s'appuyer sur de petites et moyennes entreprises en réseau, coopérant entre elles, développer la coopération, revoir aussi les modes de formation et d'apprentissage. Réparer un appareil électroménager ou resemeller une paire de chaussures, c'est faire travailler des artisans localement plutôt qu'un grand groupe en Chine. Et d'une certaine façon, rénover et isoler des bâtiments plutôt que de les détruire pour reconstruire du bâtiment monté, demain, en usine peut procéder de la même perspective. Ce ne sont pas les mêmes qui bénéficient, selon le cas, de la valeur ajoutée produite.

Alors, transition ou rupture ? le système peut s'adapter à la transition. Sera-t-il bousculé par la rupture ? A quel prix pour les plus fragiles ?

Pour le Cher, quelques créneaux d'excellence ou à soutenir : la filière maîtrise des risques, avec des applications industrielles à développer ; la valorisation de notre espace agricole et rural pour notre indépendance énergétique et alimentaire, dans sa diversité ; peut-être une filière de rénovation du bâtiment.