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26 avril 2010

Rapport Jamet : les difficultés financières des départements partiellement reconnues

Cela fait des mois, des années mêmes, que les départements de France voient venir la catastrophe sur le plan financier. Chargés du financement d'allocations individuelles pour les personnes âgées, le handicap et le revenu de solidarité active, ils sont amenés à constater des dépenses croissantes dont ils ne peuvent pas fixer le niveau. Les protestations conjointes des départements de gauche et de certains départements de droite, moins partisans que d'autres, ont fini par ébranler les "certitudes" gouvernementales. Un rapport a donc été confié à Monsieur Jamet, Directeur Général des Services du Conseil Général du Rhône pour poser un diagnostic et faire des propositions.

 

Le diagnostic est double. De façon générale, Jamet alerte et dénonce sur le poids croissant, non maîtrisable par les départements et impossible à couvrir par l'impôt local des dépenses d'allocations individuelles (aînés, handicap, RSA). On est d'accord. Plus particulièrement, il analyse, sommairement, la situation de quelques départements, dont le Cher. On aurait aimé une analyse plus rigoureuse et moins partielle, parfois partiale, comparant entre eux des départements de même taille, et une conclusion en lien avec les diagnostics. Car ce qui ressort, pour aujourd'hui, outre le poids très fort de la prise en charge du vieillissement dans les départements ruraux, c'est le poids de l'héritage concernant les stratégies d'investissement et les stratégies fiscales. En gros quand, comme dans le Cher, on (la droite !) a, à la fin des années 90 et au début des années 2000, accéléré les investissements en réduisant les recettes fiscales et donc en augmentant l'emprunt, on (la droite !) a fort mal préparé l'avenir. A l'époque, où nous étions dans l'opposition, nous dénoncions Jean-Pierre Saulnier et moi cette stratégie. Ce qui ne veut pas dire que ne rien faire pendant des années et donc ne pas avoir d'emprunt, comme l'a fait l'Indre (ce qu'on lit aussi entre les lignes du rapport Jamet), ait forcément été le signe d'une politique ambitieuse, même si, de fait, la situation aujourd'hui en est rendue plus facile.

 

Je trouve intéressante l'analyse que fait Jamet des investissements faits par les départements, pour le compte de l'Etat d'une part (les TGV, les universités, ... ) et pour le compte des communes, les départements jouant parfois le rôle des intercommunalités inexistantes ou assoupies. N'y retrouve-t-on pas quelque chose que nous connaissons ? Néanmoins, même si les investissements étaient aujourd'hui ramenés à zéro, ce qui n'est évidemment pas souhaitable, cela ne suffirait plus à résoudre l'effet de "ciseau" entre dépenses et recettes pour nos départements. Intéressant, donc, pour l'héritage ; mais insuffisant pour l'avenir.

 

Dans le Cher, les dépenses obligatoires d'aide sociale (qui, comme leur nom l'indique, sont obligatoires pour le Conseil Général) sont de 14,5 % supérieures à la moyenne (fort poids du RMI, lié à notre passé industriel, et dans une moindre mesure du vieillissement) : conséquence très logique, les dépenses de fonctionnement dont elles représentent 66 % sont aussi supérieures de 15 %. On ajoute un peu trop de frais financiers en raison de l'endettement dû à la droite (voir ci-dessus) et une politique avantageuse pour le personnel héritée aussi de la droite (et que je ne regrette pas), quelques aides pour redresser, après 2004, des structures laissées bancales par la droite, et le compte y est. Dépenses de fonctionnement "non maîtrisées" dit le rapport : effectivement, non maîtrisées par le Conseil Général puisque essentiellement imposées par la loi.

 

Quant aux propositions du rapport, quelques bonnes pistes et quelques suggestions franchement cosmétiques.

 

La bonne piste, c'est l'aide immédiarte de l'Etat à quelques départements les plus en difficulté. La solution cosmétique, c'est le montant annoncé pour 2010 et 2011 : 200 millions d'euros au total quand la dette de l'Etat aux départements est estimée à 12 milliards d'euros, ce n'est franchement pas beaucoup. Il est vrai que l'urgence est moindre dans certains départements, mais tout de même. Peut mieux faire.

 

L'autre bonne piste, c'est la proposition de distinguer dans les budgets les charges d'allocations des autres charges de fonctionnement. Bien sûr, cela ne constitue pas en soi une solution mais cela permet de mettre le doigt sur l'insuffisance des financements de l'Etat. Disons que cela peut être stratégiquement intelligent pour les négociations à venir.

 

Le rapporteur surtout, affirme clairement que la réforme en cours de la fiscalité locale ne répond en rien aux besoins structurels des départements. Il évacue les ergotages des spécialistes pour savoir si l'Etat doit "compenser" ou "péréquer" ses financements pour affirmer, après le Conseil Constitutionnel, qu'une péréquation plus efficace reste indispensable. C'est peut-être cela le point le plus important. En gros, copie à revoir pour Fillon et Sarkozy.

 

Quelques dénonciations percutantes sur l'immense bazar que constitue aujourd'hui la gestion du RSA, dans une improvisation nationale des CAF terrifiantes. Quelques propositions de simplification utiles. Quelques autres, qui font hurler les "girondins", pour permettre une véritable connaissance nationale de la mise en oeuvre locale de la loi. Elles me paraissent pertinentes, tant je suis convaincue qu'elles sont indispensables pour éclairer les législateurs et qu'elles sont utiles pour un pilotage intelligent des politiques locales. Mais cela n'apporte pas un sou !!!

 

Mutualisations, expérimentations, maîtrise de l'inflation des normes : les propositions sont d'intérêt et d'originalité diverses. Elles ne représentent clairement pas le fond du dossier. Le grand risque serait que le gouvernement ne retienne que cela pour pouvoir "annoncer" des avancées en enterrant les vraies remarques de fond. A suivre. L'ADF et son Président Claudy Lebreton doivent maintenant enfoncer le clou. Au moins sommes nous collectivement légitimés dans notre dénonciation d'un financement désormais à bout de souffle.